mardi 4 septembre 2007

SIGNATURE

Pêcheur d'archipels
D'étoiles et d'îles lointaines
Pêcheur de rires d'aigue-marine
De paroles et de chants perlés
Et d'éclairs jaillissant de l'arc tendu des Antilles
Pêcheur de prunelles dans les voies lactées
Pêcheur de lumières et pêcheur d'amitiés
Au Gulf Stream j'ai lancé le filet
Pêcheur de reflets et pêcheur d'illusions

Harponnés au défaut de la carapace
Deux ou trois îlots ont disparu dans les eaux troublées
Ma ligne perce l'océan
Comme un axe oblique et mouvant
Menant vers des formes incertaines

Cambré, reins à contre courant
Vibre le violon des illusions
Dans le miroir retrouvé mes cent visages
Pêcheur de vérités disparues
Pêcheur de couleurs, pêcheur d'amitiés
Mes visages surgissant
Mes cent visages au fil du temps
Et d'attente
Et d'espoir
De déception, de colère, de clinquant
Celui que tu m'as donné
Que je n'ai déjà plus
Celui que je voulais
Et tous ceux qu'il faudra bien me donner enfin
Que je ne connaîtrai pas

Pêcheur d'illusions, d'étoiles et de reflets
D'îlots, de tortues et de chants perlés
Pêcheur d'amitiés
Et de poissons jaillissant enflammés de l'arc tendu des Antilles
Pêcheur de lumières d'aigues-marines
Rocs durs
Galets roulés
Crissant
Jusqu'au consentement
Les étoiles
Dans ce flot, ce courant ...

GUADELOUPE

C'est une histoire d'amour
Acerbe créole
Nous ne pouvions que nous éprendre
Nous prendre et nous déprendre
Créole excessive
Rétive
Possessive
Terres griffées
Acérées
Toison râpeuse
Au vent des alisés
Onduleuse
Rocs bousculés
Ébènes veloutées
Luisantes
Chatoyantes
Fûts des gommiers
Érigés
Difficiles amours
Passionnées


Les champs incendiés
Soirs de mai
Amours brûlantes
Terres brûlées
Sentant le soufre
Le sucre vanillé


Flamboyants
Bougainvillées
Exacerbés
Et ce parfum de cannelle


Tambours
Tambours sourds
Des amours déchirées


Buissons crêpus
Cheveux tressés
Amante désirée
Ardente
Saccagée aux ouragans
Étreintes convulsées
Récifs brisés
Et les plages incandescentes
De cendres
Ou de métal coulé
Azurs versicolores
Révulsés


Amours déchirantes
Condamnées.

LES CONQUÉRANTS

Énigme
Femme
Épouse et mère
Amante
Et soeur et fille
Tehuantepec
Eldorado
L'Amérique à découvrir encore


Nous armerons des caravelles
Sur les flots de vin et de lies
Nous les emplirons d'étoiles
De perles et de verroteries


Nous armerons des caravelles
Qui reviendront chargées de lingots
De lingots et de doublons
A jeter par-dessus bord
Or argent et platine
Crabes ocellés
Dans la vasque de cristal
Sous les bannières déroulées
Des chaëtodons et des lutjans




Aurores de plumes d'aras
Oiseleurs
Des plaines d'Alaska
Flocons
Orchidées
Orchidées de diamants
Étincelant doucement


Femme
Au parfum de vanille
Et au cri du toucan
Au cri du toucan blessé
Par le dard éblouissant
Chairs tièdes
Velours aux troncs des gommiers
Cannelle
Fusées de sang
Apothéose écarlate
Cri d'amour
Du toucan agonisant


Nous armerons des caravelles
Qui reviendront chargées de jarres
De miel et d'ambroisie
Nous les viderons dans nos puits
Nos rivières et nos puits


Chanson ou bien folie ?
Nous jouerons au palet
Avec les galets d'or
Du Pérou et de Californie


Femme
L'Amérique à découvrir encore
Cargaison d'étoiles
De perles et de verroteries
Épouse et mère
Amante
Et soeur et fille
Énigme

jeudi 30 août 2007

LE BANIAN

C’est un figuier paraît-il ...
Justement il n’y paraît pas
Absolument pas
Et surtout il ne donne pas de figues


Tout d’abord on ne s’aperçoit même pas qu’il est là
Une graine germe
Apportée par un oiseau
A l’aisselle humide de la branche
D’un arbre quelconque


Le banian commence par coloniser son support
Tout vivant
Silencieux il lance une racine
Puis une autre
O ! des racines très grêles pour débuter
Et d’ailleurs il ne les allonge que lorsque vous battez des paupières
Puis elles font des enroulements
Des cascades de racines comme des noeuds de serpents
Des serpents qui se révèlent appartenir aux plus grosses espèces
Serpents pythons anacondas ou boas constrictors
Ou bien ce sont les tentacules d’ignobles mollusques
immobiles
Immobiles croyez-vous ?








Une ou deux tiges ont poussé
Autres feuilles discrètes
A peine les distingue-t-on
Le banian s’installe
On ne le délogera plus
Il phagocytera son tuteur
L’étouffera
L’étranglera
On l’appelle aussi le figuier étrangleur !


Silencieusement
Lentement ...
Lentement ?
A quelle échelle du temps ?


Cachez vos yeux
Comptez
Comptez ...
Vous pouvez vous retourner maintenant
Pendant que vous comptiez le banian
a lancé une lourde branche à l’horizontale
Comptez encore
Il en a profité pour lancer de la branche vers le sol
une tresse de racines adventives
Souples d’abord comme des câbles
Puis elles deviennent des troncs nouveaux














Vous pourriez tout aussi bien
Vous retrouver au milieu d’un bosquet
Si vous restiez là assez longtemps
Le banian élargit son emprise
Il étouffera votre maison
Ou la tour d’un palais


Figuier de l’Inde
Rien à voir avec le figuier de Barbarie


Les invasions barbares ?
Le fruit des ficus est un sycone
Rien à voir avec les sycomores
Dont on ne sait pas pourquoi ils portent ce nom
Apparemment ils l’ont volé sans raison


On appelait sycophantes dans la Grèce antique
Les marchands indélicats qui cachaient des figues
au-milieu des paniers de raisins
Je ne sais pas s’il faut parler des sicaires, ils n’ont pas le i grec
Ce sont aussi des assassins
Ils emploient seulement d’autres méthodes.



12.07.07

LES CHAUVES SOURIS

Les chauves-souris sont des chiroptères
Chiro ... quoi ?
Chiroptères ...
Je connais les coléoptères
Je connais les hélicoptères
Il y a aussi les ptérodactyles
Ptère signifie aile
Chiro, en Grec, signifie main


Les chiroptères sont des animaux dont les doigts,très allongés
sont réunis par une membrane qui forme l’aile


Mais, chiroptère renvoie à chiromancie et voilà pourquoi, peut être,
la chauve-souris est associée à la magie, à la sorcellerie
Et les dames porteront la main à leur chevelure ...


Mais, chauves-souris ?
D’abord elles ne sont pas chauves
Tout au moins je n’en ai vu aucune qui le soit
Souris ?
Certaines seraient plutôt musaraignes tant elles sont petites
C’est le cas de la pipistrelle que l’on voit chez nous
papillonnant dans les jardins














Par contre la roussette des régions tropicales a plutôt la taille
Et l’aspect d’un petit fox-terrier
D’un chiuahua
D’un petit renard
Museau pointu
L’oeil en escarboucle
Grandes oreilles dressées
La fourrure douce et rase


Certaines sont insectivores
Je connais mieux celles qui se nourrissent de fruits
Elles passent au crépuscule
en silence
Avec un ample battement d’ailes lent
Ombres au clair de la lune
D’un vol très sûr et à peu près indifférent
Dans les cocotiers
Les manguiers
Les papayers
On les entend parfois couiner de satisfaction
A moins qu’elles ne bavardent entre elles, tout simplement
A l’aube elles repartent vers les grands arbres où elles couchent


















Coucher ?
Non, elles se suspendent aux branches d’un arbre mort
Tête en bas
Par centaines ou par milliers
Elles replient leurs ailes de satin jusqu’à se cacher les yeux
On dirait de petits sacs noirs
Elles dormiront toute la journée
A peine babillant de temps en temps.


Mais les vampires ?
Les vampires, ça existe, c’est vrai, ils sucent le sang
ça existe ...
Au Brésil !










16.07.07

DÉSIRS

Aux pages de garde les espaces liquides, toujours immobiles, et chauds ...
Figures d'ébène, et boîtes d'écaille à la fois
Aux fronts des éléphants, médailles de noires étoiles
Que restera-t-il des rideaux de perles,martinets aigus aux persiennes mi-closes ?


O ! Les senteurs des tabacs de Havane !
Dans l''herbe bleue du petit matin, les arcs-en-ciel, sous nos pas ...
Et chantèrent, asservies, les vagues, sous nos implacables mécaniques
Mais nos pieds furent nus aux cailloux des chemins
Nous avons tracé nos miroitants sillages,
Promenant l'extrémité de nos doigts sur les bords des abimes


Et palpé
Renversant les présumées idoles
Les odeurs de ciel et d'océan


Nos yeux noyés d'ombre et remplis de lumière
Nous guidaient aux voies invisibles calculées
Que restera-t-il de notre quête ?


Au bout de nos sillons éphémères, et surgissant de nos lointains oublis,
Nous avons, du centre de la terre, arraché la pierre indiscutable
Nous l'avons équarrie,
Encore à la recherche de nous-mêmes


C'est là que fleurissait la mandragore !
Au large les océans, toutes bornes versées !
Devant nous les océans, devant, les vastes étendues !


Dressée
L'obélisque présumée de nos pensées indéchifffrables
Puis nous avons nous-mêmes, autour de nos thorax, noué les turgides racines du figuier


Mais nous portions au ventre la marque de nos origines


Nos ovations, nos prières et nos plaintes, à quoi bon ?
Qu'importent nos cris de poivre et de piment ?
Et que sont devenus
Les triangles de nos idées ?
Vos siècles balançant, qu'importe, syncopes de nos yeux fatigués ...
L'humus échauffé grouille de germes étranges


Décrites
Et tout à tour perdues
Que deviendront nos stèles héroïques, gravées d'authenticité ?


Le pouviez-vous ?
Aux heures immobiles, ma bouche est close, et ma paume fermée ...



28.04.82

CARAVELLE

Le son de l'océan
Sourd
Dis-moi
Dis-moi maintenant
La sapotille
Et la cannelle encore


A ta lèvre poivrée
Menthe
Je sais le scarabée
D'or


Demoiselle palpite
Sacre
A la nervure bleue
Nacre
Du réseau temporal


Dis-moi
Dis-moi maintenant
La sapotille
Et la cannelle encore ...

LA GENÈSE

L'attente sais-tu
Sans un mât
Sans un bruit
Sans un souffle la mer
Bleu profond vert
Longs cingles blancs
Et le soupçon
D'un dos basculant
Luisant


Frétillement filant frénétique


Et
Sorti du néant
Mouvant
Gonflant
Nuage sur la mer
D'oiseaux grêlant
De dards de vif-argent
La mer crépitant
Et fuseaux d'acier bleu


Comme pierres les chutes
D'oiseaux noirs et blancs
Criant
Tisons emportés
De mort la vie jaillit
Lambeaux
Et le ciel déchiré


Ton sang
Battant
Cingles sur la mer
Sans un souffle la mer
Et le ciel dans la mer
Et l'angoisse


Diffuse
Dans la mer la lumière
Sur la mer
Dans l'eau le ciel
Glacis d'argent
Un voile au loin ligne longue


Un oiseau
Seul
Rectiligne vol d'oiseau


Mais sais-tu l'attente
Coeur serré d'orage
Un voile au loin ligne longue ...

UNE SI LONGUE ABSENCE

Pour aimer les fleurs
Vraiment
Il faut les avoir vu faner
Puis sur les mêmes tiges
En voir d'autres s'éveiller


Mais toi, voyageur
Si la fleur éclose
N'est jamais la même
De quoi te plains-tu ?


En un si long voyage
Jamais la même aurore
Après semblable nuit


Les blés moissonnés
N'ont jamais repoussé
La feuille tombée
N'a pas été remplacée


En un voyage au si long cours
Tant de soleils ont brillé
Tant d'étoiles ont glissé
Les visages rencontrés
N'étaient jamais les mêmes


As-tu pris le temps d'un arrêt
Pour mûrir
Une amitié ?


On dit adieu
Souvent
A ceux qu'on aurait pu aimer
Adieu
Sans prendre le temps
De mûrir un bonjour


En un voyage au si long cours
Le bateau qui appareillait
Ne revenait jamais
Et celui qui rentrait
N'était jamais celui qu'on avait vu partir


On n'a pas vu vieillir les filles
Les vieillards
On ne les a pas vu mourir


Sourires de Bangkok
Et frangipaniers
Saris de Kandi
Et fleurs du lotus
Femmes de Komono
Fleurs du balisier


Matins froids du Québec
Lourdes pluies du Laos
Dans ma mémoire le volcan
ne se calmera jamais
Le cyclone n'aura point de fin
Le Mékong coulera
Toujours large et boueux
La Loire resera épuisée
Et le Congo
Couvert de jacinthes


Et passe le temps ...


Me voici revenu
Flots froids de mon enfance
Pins secs
Sables veloutés
Et la blanche maison
Tout près du vieux clocher ...


"C'est toi, René
Et ta femme Marie ?
Comme ta fille lui ressemble
A la Marie d'autrefois ! "

LA DERNIÈRE RAME

De Hâvre-Caumatin
A l'Opéra
Tropique du Cancer
Le Hâvre un beau matin
La brume et la lumière


De Hâvre-Caumartin
A l'Opéra
Bora-Bora


Les hâvres et les ports
Et les feux et les forts
Les signaux et les phares
Les trompes carillons
Les bouées
Les pavillons
Le Hâvre-Caumartin ...




La Porte
S'il vous plaît !




décembre 1983

TANNA (VANUATU)

Chevaux fous
Sur la mer
Blonde et bleue
Fauves fous
Herbe feu


Calme palme
Blanche et bleue
Le mont fumant
Le goéland
D'argent


Fente des paupières cousues
Corail éblouissant
Plage ardente et noire
Moutons marins
Madrépores
Morts
Fluctuantes écharpes
Des poissons émaillés


Tourmaline
Roucoule tourterelle
Sombre serre
Fruits pesants
Pendus
L'arène au soleil
De cendre et d'argent
Le taureau qui dort
Torte-pieds deux arbres morts
Bulle bleue du lac
Les yeux
Les cieux
Femme-flamme
Yodelis de joie
Les chevaux
Fauves-fous ...

mercredi 29 août 2007

VANUATU

Il est des îles
Faites de toutes les îes
Promises ou reprises
Caressées rêvées
Ravagées violées


Celles qu'on a voulu
Celles qu'on a eues
Lagons versatiles
Langues d'huile et de myrte
aux oursins bleus


Iles-femmes
Prêtes à s'ouvrir
Il est des îles
De laves et de cendres
Au souffle tranquille
Des volcans respirant
Monstrueusement


Iles accroupies
Dures et splendides
Et le front baissé
Leur ciel se referme
Sur l'ineffable vie
D'improbables secrets


Iles solitaires
Ne m'attendant guère

GUADELOUPE

Les doigts
Des larges feuilles déployées
Parfums
Aux aisselles de la nuit
Soie
Et la peau de la nuit


Lueurs
Aux ventres des galets
Trajectoires
Des lucioles prenant vie


Pulsations
Flûtes et crécelles
Aux plans successifs de la nuit
Flux
D'un ruisseau haletant


Lourdes gouttes
Froissements
Et l'haleine vaste
De la nuit
Le sentier monte
L'homme dort
Dans les cercles
De ses réverbères électriques


Aboi


Et derrière
L'océan qui respire


Ma main
Sur la hanche de la nuit
Ma joue
Sur le flanc de la nuit ...

RAIATEA ( ILES-SOUS-LE-VENT)

Un lapidaire
Lequel ?
Quel orfèvre en émaux et camées ?
O mon amour !


Mais au récif là-bas
Chevaux d'un autre temps
Cabrés
Grands chevaux blancs d'écume
Les pieds battant le vent


Autre temps mon amour ...


Épaule d'une île
De velours diaprée
Plumes d'or
Émeraudes et saphirs
Et sulfures mêlés
Résilles
Aux fougères des pentes


Le temps mon amour
Le temps absolument
Et l'odeur de vanille
Dans les paumes du vent


Aquateintes
Corolles
Et saris drapés
De jaspe et de moire


Le temps mon amour
Le temps répandu
Poli
Sert


Bleu-de-roi
Bleu-de paon
Bleu-de prusse
De strass et d'argent
Le temps-colibri
De lumière coulée
De lavande et de lin


Le temps mon amour
Et l'odeur de vanille
Dans les paumes du vent
Le temps mon amour
O mon amour présent !i

LES GRANDES DÉCOUVERTES

À la sonde
Plus de fond
Une île encore
S'en est allée
Jamais
Au grand jamais
Je ne saurai son nom


Nous rangeâmes un matin
Un beau matin de juin
Nous rangeâmes une île
A notre vent


Or nous courions
Depuis si longtemps
Ô ! Si longtemps
Tant d'océans
Et tant de brumes
Et tant de vents !


Babord amures
Et bord sur bord
Petite voilure
Ô ! Si longtemps !
Tant de fièvres
Et tant de faims !


A notre vent
Des bois
Des champs
Des boeufs passant
Ô ! Si longtemps !
Oui, si longtemps !


A la sonde
Plus de fond
Encore une île
A la dérive
S'en est allée
Jamais
Au grand jamais
Je ne saurai son nom

CENT MILLIONS D'ÉLÉPHANTS LAOS

Le panier capitonné
La théière emmitouflée
Le thé fade
A tièdi


Odeurs de pavot
De la pipe à eau
Mékong noueux
Boueux visqueux
Moiteur


Lèpre des murs
Tôles rouillées


Longs trains de bois flottés
Pluie épaisse
Infinie
Noirs frangipaniers
Senteurs de cannellle
Charnelles


Rose et blanc
Dans la mare
Un nénuphar
Fervent


Fléaux aux lourds paniers
Chapeaux de latanier
Poulet grillé
Varans écorchés
Riz violet
Sauces au poisson sec
Odeurs de soupe
Et de tabac roulé
Chalands qui s'attroupent
Au marché du soir
Tissus bariolés
Canards qui cancanent
Taxis et pousse-pousse
Giclées d'eaux sales


Le panier capitonné
La théière emmitouflée
Le thé fade
A tiédi

SRI-LANKA

Tant de soleils ardents
Sur les murs desséchés
Villes entièes
A la terre revenues
Ocre-rouge sang séché
En poussière foulé


Aux chemins tant de pas
Tant de faim et de fièvre
Et d'espace et de temps
Et de mort et de vie
Tant de vies résignées
Aux limites abolies


Tant de moussons crevées
Et tant de vents si violents
Capitales diluées
Mosaïques de briques
Par le temps corrodées


Trompettes tambourins
Les sabots des chevaux
Des soudards conquérants


Tant de diables mendiants
Et de pieds en lambeaux
Rues
Des villes disparues
Rabotées


Fleurs de lotus
Offertes
Et tenues à la main
O ! Tant de pèlerins
Tout au long du chemin !


Un jour suivant l'autre
Une vague après l'autre
Et les flux infinis
Des chemins de la vie


Ocre rouge sang séché
En poussière foulé
Tant de pas
Tant de faims


Au pied des dagobas
Tant de Bouddhas scuptés
Et de fruits miroitants
Tant de sons tant de chants
Tant de vagues argentées
De saphirs de rubis
De topazes brûlées
De batiks de saris
Filles
Aux effluves du thé


Capitales oubliées
De vent et de poussière
Des macaques attroupés
Des racines nouées
Aux énormes banians


Tant de bûchers allumés
Tant d'enfants affamés
Consumés
Combien Bouddha
Pour ta sérénité ?

ARANYAPRATHET

_ à tous les petits enfants cambodgiens.





Un arbre blanc
Nâvré
Tend sa branche sèche
Le chaume a brûlé


Gong de bronze du soleil à midi
Tais-toi l'enfant


Nuages lourds d'oxydes
Aurons-nous la pluie ?


La mare est jaune de chrome
La corne du buffle est noire
Le vent vert
Le paddy lèvera


Et les vols d'oiseaux aquatiques ...

mardi 28 août 2007

747

Cent quarante deux tonnes
Trois cents passagers
Cinq chaînes musicales dans les accoudoirs
Des écouteurs en location


Champagne


Mais où est donc l'Himalaya ?
Après Calcutta les bouches du Gange
Nervures de feuille de platane
Deux mille mètres en-dessous
Chuintement des réacteurs
Doux
Loin derrière


Quelle heure est-il ?


Un volcan qui fume au sud de Java
Chaînes d'ïles et d'îlots
Puis le désert d'Australie
Couleur de rouille


Nex York la nuit
Les hight ways
Sont des arbres de Noêl


Vous prendrez du saumon ?


Au Groënland
Ou sur la baie d'Hudson
On rêve d'ours blancs
De traîneaux
Et de Jules Verne
Températue extérieure vingt trois degrés sous zéro
Neuf cents kilomètres à l'heure
Route orthodromique


Quand tu vois les rochers des Shetlands
Paris n'est plus qu'à une heure
Mesdames et messieurs
Ladies and gentlemen
Le commandant de bord et son équipage espèrent
Que vous avez fait un bon voyage
Nous vous recommandons de ne pas détacher vos ceintures
Avant l'arrêt complet des moteurs ...

LE TEMPLE KHMER DE PANHOM-RUNG

Capuchon dilaté tête triple
Le Naja-père glisse à la vasque du lotus
Mille marches rouges en plein soleil
Mains jointes courbé saluer trois fois
A la roue du destin placer l'obole


Siva aux multiples bras danse sur le mont
Plier sous le joug
Entrer au risque de la danse
Sous les blocs un diable rit
L'ombre garde des odeurs d'encens et de cire
L'eau sainte dut couler sur la dalle autrefois
Où se dessine un triangle de lumière


Coller au front du boeuf la feuille d'or
Psalmodie pour le rythme des saisons


L'issue est en plein ciel
Au gardien de pierre grise
Les lanciers s'y pressent
Et les archers
Et les éléphants de profil
La voie de cinabre monte
Marquée de stèles
Dans l'union du ciel et de la terre ...


Les rizières et les vols d'oiseaux aquatiques ...

lundi 27 août 2007

C'EST LE CHIEN DE JEAN DE NIVELLE

Debout au musoir à midi
Un mendiant faisait la manche
Les badauds regardaient
Quelque chose qui n'était pas là

C'est la drague disait
Un cheminot bulgare
Elle a plongé à minuit
En brisant ses amarres

Et le cheminot avait un bras coupé
On pense qu'elle creuse en silence
Sans concordat
Un tunnel sous la manche

En haut des falaises
La reine de Buckingham a placé
Quatre bobbies en bonnets à poils
Ils ramassent la monnaie




23 mai 1992